Comme
nous l’avons vu précédemment, la mission militaire française au Hedjaz de 1916
à 1920 ne va concerner que des effectifs réduits et ce, au regard des masses
déployées en France par exemple. Pourtant, les cadres qui vont être plongés
dans cette épopée militaire avec des conditions d’engagement d’une grande
difficulté vont être les vrais acteurs du succès des opérations menées face aux
Ottomans. Encadrant principalement des unités issues d’Afrique du Nord et
composés de soldats algériens, marocains ou tunisiens, ces officiers et
sous-officiers sont pour certains musulmans ou, pour d’autres iront jusqu’à se
convertir à l’Islam pendant la mission. Certains d’entre eux ont été oubliés
malgré leur héroïsme, leur sens de l’adaptation, leur faculté d’intégration
auprès des troupes chériféennes et malgré leur grande intelligence tactique. Je
vais donc m’attarder sur les personnalités et carrières de certains d’entre eux
afin de saluer leur mémoire et saluer leurs qualités comme leurs parcours
atypiques.
Pour
commencer, il est indispensable d’aborder le chef de la mission militaire, le
colonel Edouard Brémond. Né en 1868 à Paris, il entre à Saint-Cyr en 1888 et en
sort 22ème au classement de sa promotion. Il rejoint le 1er
RTA avec lequel il fera la difficile campagne de Madagascar avant de revenir en
Algérie où il servira 17 ans. Breveté de l’Ecole supérieur de guerre et
chevalier de la Légion d’honneur en 1901, il est affecté au Maroc où il forme
le 7ème Tabor de police des ports de Rabat. En 1909, il est le chef
de la mission militaire du Maroc et, en 1911 il conduit des opérations face à
la tribu Cherada en révolte. Ses faits d’armes lui valent d’être nommé grand
officier de la Légion d’honneur puis de devenir officier de renseignement à
Meknès. Au début de la première guerre mondiale, il commande u régiment d’infanterie au feu, il est cité et
blessé. Il devient alors sous-chef d’état-major du 35ème corps d’armée.
Il est ensuite mis à la tête de la mission au Hedjaz de 1916 à fin 1917, date à
laquelle Paris est contraint de le rappeler en France devant les critiques des
Britanniques qui voient en lui un concurrent trop brillant au détachement
conduit par T.E Lawrence. C’est un praticien de la guerre qui a le souci du
détail et une grande culture générale. Arabisant, il écrira plusieurs ouvrages :
« Le Hedjaz dans la guerre mondiale »
(préfacé par le maréchal Franchet d’Esperey) mais aussi « Les conseils pratiques pour les cadres
de l’armée métropolitaine appelés à servir en Afrique ou au levant » où il
aborde, avec anticipation pour son époque tous les paramètres sociaux,
familiaux et humains tout en insistant sur la nécessité de s’approprier la
culture du pays où le militaire sert. Enfin, il rédigera « L’Islam et les questions musulmanes au point
de vue français » dans un souci de réflexions sur les problématiques d’intégration
culturelle. C’est l’anti-Lawrence d’Arabie tant dans la pensée que dans l’action
militaire. Il souffrira également d’une différence de perception avec le GQG en
France et le gouvernement, ce dernier ne l’informant, par exemple, des accords
Sykes-Picot que 5 mois après leur signature.
Sous
ses ordres, de nombreux cadres aux parcours divers l’accompagnent au Hedjaz.
Il
y a le lieutenant-colonel Cadi, le premier algérien polytechnicien à 22 ans qui
devient artilleur. Combattant sur le front occidental, musulman, né en 1867, il
reçoit la Légion d‘honneur en 1915 pour son action au sein du 15ème
RA. Il est un vrai atout pour Brémond comme officier de liaison auprès du
Chérif Hussein à La Mecque. Auteur, il écrira « Voyage en Terre d’Islam » où il fait la synthèse du Coran et
du modernisme et démontre l’attachement des musulmans français à la République.
On
trouve également le capitaine Mohamed Ould Ali Raho, officier des Spahis
algériens, qui s’illustrera notamment lors du siège de Médine ou de la gare d’Aba
el Naam. Il suivra l’émir Abdallah avec ses hommes tout au long de la campagne
et sera tué en 1919 en défendant le bivouac chériféen à Tarabah face à un raid
des troupes d’Ibn Seoud. Une tombe non identifiée retrouvée sur place il y a quelques
années pourrait être la sienne. Il faut également citer le capitaine Depui, les
lieutenants Zémori, Bendjenat et Kernag, l’adjudant-chef Chatelain, l’adjudant
Lamotte et l’adjudant Trabelsi , les sergent Azoug et Metery, le maréchal des
logis Prost ou le caporal Matte sans oublier les capitaines médecin Montero et
Fournier.
D’autres
figures, hautes en couleurs, font montre d’un grand professionnalisme, dans les
actions de sabotage comme dans l’appui feu (mitrailleuses ou canons) des troupes
arabes. C’est le cas du lieutenant Sid Mohamed Lalhou qui commandait, avant
cette opération, l’infanterie de la garde noire du Sultan du Maroc et qui
accepte de servir en Arabie. Avec son détachement et des soldats de l’émir Ali,
il prend la garnison de Bir derouich en tuant 125 Turcs et en en faisant 17
prisonniers (ses propres pertes : 2 tués et 10 blessés seulement). Mais c’est
le capitaine Pisani qui, encore aujourd’hui, en Jordanie notamment, fait figure
de héros. Né à La Calle en Algérie en 1880, il est d’origine maltaise. Il s’engage
au 3ème bataillon d’artillerie à pieds en 1901. En 1907, il rejoint
en qualité de maréchal des logis le 7ème Tabor marocain (sous les
ordres d’un certain capitaine Brémond) puis est affecté en 1909 à la mission
militaire française au Maroc. Adjudant, il se bat sous les murs de Fez en 1911
et il est nommé sous-lieutenant et chevalier de la Légion d’honneur en 1913.
Lieutenant en 1914, il se bat en France avant de rejoindre le Hedjaz où il sera
le conseiller militaire français de l’émir Fayçal. Ce dernier aura beaucoup d’estime
pour lui et réclamera sa présence à ses côtés lors de la conférence de la paix
en 1920. Après la guerre il rejoint le Maroc et termine sa carrière comme
commandant en 1928 avant de mourir à Fès en 1951. C’est un tacticien hors pair
qui est admiré par ses hommes qui l’appellent Abu Tlatah (le père 3 galons) mais aussi par les généraux arabes comme
Nouri Said et par T.E Lawrence (qui le cite dans son livre « Les sept piliers de la sagesse »). Il
mène de nombreuses actions victorieuses qui lui valent la « Military Cross » britannique et met
au point la technique de sabotage du « repiquage
de tulipes » sur laquelle nous reviendrons. Son bilan en 1917 est
élogieux puisqu’il capture 2 trains
ottomans, tue ou blesse 550 soldats turcs et fait 1000 prisonniers.
Il
conduit ensuite le détachement français de 146 hommes pour le raid engagés d’Aqaba
à Damas en septembre-octobre 1918, parcourant plus de 1000 km d désert avec sa colonne.
Cette dernière est composée d’une antenne médicale, d’une batterie d’artillerie,
d’une section de mitrailleuses, d’une équipe de transmissions (téléphonie et
TSF), d’une section de génie, d’une section de tirailleurs (sergent Belgacem),
d’un four de campagne, de 2000 coups par canon, de 30 000 cartouches et de
3 mois de fourrage. La seule section génie dispose de 110 chameaux pour la mission.
Le 26 septembre 1918, alors qu’il assure avec ses hommes et quelques centaines
de combattants arabes la flanc garde de l’armée de Fayçal, il arrive à disperser
8000 Turcs qui se replient d’Amman en utilisant ses canons de 65mm pour faire
croire qu’il dispose d’une puissance de feu bien supérieure à la réalité. Il rentrera
en vainqueur avec ses hommes dans Damas le 30 octobre 1918.
Si
ces hommes se battent sur le terrain, d’autres participent à l’effort avec efficacité
en formant les troupes locales comme le
lieutenant Mustapha Issad à l’école des sous-officiers de La Mecque ou le
commandant Romieu qui instruit à Chypre la « Légion d’Orient » (Arméniens, Syriens et Chrétiens du Levant
et de Cilicie).
Il
faut donc saluer l’engagement de ces hommes pour beaucoup issus des unités
coloniales, d’origine européenne ou maghrébine, chrétiens, athées ou musulmans
mais tous au service de la France. Nombre d’entre eux retourneront après-guerre
en Afrique du Nord.
Pour
conclure, le meilleur hommage à ces soldats, français, tirailleurs, tabors,
fantassins, artilleurs ou spahis, de tous grades, se trouve dans la lettre de l’ambassadeur
britannique au Caire Sir Wingate, qui est transmise à Paris pour remercier la France
de son appui dans le Hedjaz : « Au
colonel Brémond, aux officiers français et musulmans, sous-officiers et hommes
de troupe composant le détachement franco-algérien, le plus vibrant hommage
doit être rendu (…) Leur efficcacité, leur collaboration amicale et leur bonne
volonté ainsi que leur débrouillardise dans la difficulté et dans les
conditions de service et de climat les plus pénibles qui soient, ont toujours
largement contribué au succès des opérations combinées auxquelles ils ont pris
une part très valeureuse et remarquable ».
Ils
s’inscrivent donc dans la continuité des armées françaises, de leur histoire et
des engagements d’hier et d’aujourd’hui.
I am making a research about the french mission in Hedjaz 1916 1920 , & I want to know about the troops location in Hedjaz cites & their numbers & the period that they stay, help me please if you have these information.
RépondreSupprimerThanks
Khalid Ali
Je fais une recherche sur la mission française en Hedjaz 1916 1920, et je veux savoir sur l'emplacement des troupes en Hedjaz cite et leur nombre et la période pendant laquelle ils restent, aidez-moi s'il vous plaît si vous avez ces informations.
RépondreSupprimerMerci
Khalid Ali