Cet
article consacré aux « combattantes » a pour ambition d’introduire
des portraits qui mettent en lumière des destins connus comme des faits d’armes
plus confidentiels. Chacun d’entre eux
ont souvent fait l’objet d’ouvrages riches et largement documentés ou d’articles
spécialisés. En effet, alors qu’aujourd’hui la présence des femmes dans les
forces armées, y compris sur les champs de bataille modernes, parait comme une
évidence, on oublie souvent que l’histoire militaire, de l’Antiquité jusqu’au
XXème siècle, regorge d’exemples de femmes de guerre qui ont
participé aux grands conflits à des postes allant de fantassin à pilote d’aéronefs
en passant par espionne, infirmière ou commandant d’une unité.
Nous
balaierons donc, dans les lignes qui suivent, quelques épisodes mettant en
exergue cette engagement féminin dans la guerre.
A
l’époque biblique, des femmes n’hésitent pas à porter les armes comme en
témoigne l’épisode de Déborah, une jeune juive, qui remporte une victoire
mémorable lors de la conquête du pays de Canaan près du Mont Tabor. Avec son
armée, elle use de l’effet de surprise en profitant de la pluie pour masquer sa
manœuvre et vaincre les troupes du cananéen Sisera. De même, dans l’Antiquité,
la légende des Amazones naît avec les écrits d’Hérodote et s’appuie
probablement sur les guerrières Scythes d’Asie centrale. Au cours du Moyen-Age,
contrairement aux idées reçues, de nombreuses nobles, dont certaines célèbres, comme
Ida d’Autriche et la fille d’Eudes de Bourgogne, se battent, aux côtés des
chevaliers, lors de la première croisade ou sous les murs de Saint-Jean d’Acre
en 1191. Dans la période trouble qui entoure la guerre de Cent ans, des
suzeraines, même si elles ne portent pas l’épée, sont contraintes de diriger
les hommes d’armes pour protéger forteresses et cités ou encore pour préparer
la stratégie politico-militaire, à l’image de ce qu’accomplit une Aliénor d’Aquitaine
par exemple. Comment ne pas évoquer bien sûr Jeanne d’Arc et son action
décisive pour la reconquête du royaume de France comme le montre son action héroïque
lors du siège d’Orléans.
Après
une éclipse dans l’engagement féminin à partir de la Renaissance, la Révolution
française et les guerres menées par la jeune république donnent l’occasion à
des combattantes de s’engager dans la fournaise de la bataille. Le Service Historique
de la Défense dispose d’ailleurs des états de service de certaines de ces
militaires qui, comme le lieutenant Ursule Aby en 1791, l’artilleur Marie
Adriam en 1793 ou encore Jeanne Marie Barrère de la 5ème demi-brigade
d’infanterie (pour laquelle ses supérieurs écrivent qu’elle dispose « d’un
courage au-dessus de son sexe » refusant d’être évacuée malgré une blessure) font honneur à leur pays.
Plus tard encore, le caporal Marie Angélique Duchemin recevra la légion d’honneur
en 1851 pour ses faits de guerre au cours des campagnes de Bonaparte.
Il
existe d'autres traditions de femmes-guerrières à la fin du XIXème
siècle. Au Dahomey, sous le roi Agadja, le souverain Ghézo (1818-1858) crée des
compagnies féminines de cavalerie et d'infanterie qui seront baptisées les «
Amazones vierges du Dahomey » et combattront d'abord dans les affrontements ayant
opposé le Dahomey aux Yoroubas. Par la suite, le roi Béhanzin les utilise contre
les troupes coloniales françaises. De même, au Sénégal, le royaume de Cayor
envoie ses « Linguères » (sœurs et cousines des souverains) dans ses
différentes batailles contre les Maures. L'Empire zoulou, quant à lui, avait
auparavant constitué des régiments de jeunes filles combattantes ou chargées de
la logistique face aux armées de Grande-Bretagne.
Mais
c’est bien le XXème siècle qui mettra en lumière les femmes de
guerre au cours de la succession des deux conflagrations mondiales et les batailles
de la décolonisation. L’année 1914, et les combats qui suivent jusqu’en 1918, conduisent
les femmes à soutenir l’effort de guerre (usines d’armement, travaux des
champs) mais également à rejoindre le front. Elles sont spahis comme Fatima,
qui se fait passer pour un homme afin de suivre son compagnon depuis le Maroc jusque
sur les champs de bataille de la Marne, agents de renseignement derrière les
lignes allemandes, à l’image de Louise de Bettignies arrêtée en 1915,
infirmières mortes pour la France sous le feu comme Victorine Henriette Pauze.
Dans d’autres pays, en Russie, c’est près de 6000 femmes qui se battent dans
des bataillons de première ligne. Le second conflit mondial sera, pour sa part,
le plus révélateur et le plus riche en exemples concrets. En effet, le besoin
en effectifs nécessite l’engagement de toutes les forces vives des
belligérants. Si la France Libre peut compter sur son corps de volontaires
françaises pour les états-majors mais aussi le BCRA (actions clandestines) ou
des « Rochambelles » (infirmières et conductrices ambulancières) de
la 2ème DB de Leclerc, les Britanniques recrutent 9% de femmes, regroupées
au sein du WAC (Women’s army corps) et les Américains 150 000 militaires féminines
pendant que Staline engage jusqu’à 500 000 soviétiques, y compris dans les
ruines meurtrières de Stalingrad.
Après-guerre,
d’Indochine à l’Algérie, de Dien Bien Phu aux SAS du Djébel, des figures deviennent
des symboles de l’action des femmes pour leur pays comme, par exemple,
Geneviève de Galard ou Dominique Sidot. Aujourd’hui encore, des Etats imposent le
service militaire obligatoire pour les jeunes femmes, en Israël ou en Erythrée.
Enfin, sur les théâtres d’opérations contemporains, des femmes s’illustrent
aussi bien que leurs camarades masculins avec l’américaine Monica Brown, en
2012, seconde combattante d’outre-Atlantique
à être décorée depuis 1945 ou, plus récemment, le lieutenant Duhamel du
40ème RA qui a reçu la croix de la valeur militaire à la suite de son
action en Afghanistan.
Aussi,
pour conclure, les femmes ont, de tous temps, participé à l’histoire militaire
ainsi qu’aux combats de leurs époques et méritent que l’on évoque, au travers
de quelques portraits, ce qu’elles ont accompli. Des articles à venir vous
seront proposés pour rendre hommage à ces combattantes et afin de mettre en
perspective leur engagement dans l’évolution tactique et technique de l’art de
la guerre.
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