Début 2013, la France s’engage au Mali pour neutraliser les djihadistes qui menacent Bamako et surtout les populations civile de cette région du Monde. Le général Barrera prend le commandement de l’échelon tactique aéroterrestre de cette opération. Il nous livre aux éditions du Seuil son témoignage de chef et d’homme sur cette épopée moderne dans un milieu désertique extrême et face à un adversaire asymétrique d’un nouveau type, fanatisé, drogué mais qui demeure redoutable dans les actions de combat, les embuscades ou les attaques suicide.
Cet ouvrage souligne
les qualités techniques, tactiques et humaines du soldat français héritier d’une
longue histoire militaire, fier de son engagement pour la Nation et endurant
face à l’adversité, au milieu du désert, dans des combats au corps à corps au milieu de rochers brûlants.
Le livre met parfaitement en
évidence, avec des termes accessibles à tous les profanes des questions de
défense, l’importance de la préparation opérationnelle, de l’entraînement, des
réflexes acquis en métropole pour s’adapter à la menace, à la mission et aux
circonstances.
Le général Barrera détaille ainsi avec précision le processus de
planification des opérations, le souci du détail, la réflexion quant aux cas
non conformes, ses doutes, mais aussi son intransigeance quand il estime que
ses hommes pourraient être mis en danger par des décisions irréfléchies. Dans
ce cadre, on peut noter, tout au long de
la lecture, la pression de l’échelon stratégique sur les troupes déployées (typique
des engagements contemporains), la nécessité d’obtenir des résultats au plus
vite selon un tempo financier et médiatique contraignant, tout comme l’impact
grandissant du temps dans la guerre face à des adversaires hybrides et ce,
comme nous l’évoquions dans notre article sur la chrono tactique :
En outre, la manœuvre interarmes
est un leimotiv de l’auteur qui
rappelle l’importance des appuis (génie et artillerie) pour appuyer l’action de
l’infanterie dans l’Ammetetaï ou les raids blindés vers les vallées du Grand
Gao, sans compter le nécessaire déploiement des hélicoptères de manœuvre et d’attaque
qui donne la mobilité et la réactivité nécessaires aux saisies d’opportunité. Le
lien fort avec les forces alliées, malienne et tchadienne en particulier mais
aussi le travail incessant des membres du service de santé des armées ou des
transmetteurs (incontournables pour les liaisons sur ces espaces immenses et la
numérisation des PC) revient au fil des pages. Enfin, l’importance du
renseignement apparaît clairement pour préparer les opérations, comprendre l’adversaire
et surtout anticiper le temps suivant.
La recherche de la surprise,
l’imagination dans la conception de l’action ont également permis de garder l’initiative
sur les groupes armés terroristes déstabilisés par ces principes tactiques
incontournables (voir notre article : http://lechoduchampdebataille.blogspot.fr/2014/09/de-la-resilience-tactique-ou-comment.html
).
De même, les moyens feux et
leur coordination donnent au chef la liberté d’action nécessaire à une conduite
efficace, les canons CAESAR, les mortiers de 120mm, les avions de chasse et les
Tigre se complétant utilement en fonction de l’effet à obtenir, des impératifs
du terrain ou de l’environnement. L’auteur souligne également les élongations
et les difficultés logistiques, défi largement relevé par les unités du Train
et les moyens de l’armée de l’air. Les véhicules de nouvelle génération auront
fait la différence à l’image du VBCI ou du CAESAR alors que les engins anciens
tiennent bon grâce au travail exemplaire des maintenanciers. Le soutien de l’homme,
face à des conditions climatiques extraordinaires et des conditions de stationnement
rustiques, occupe une large place dans les considérations du général Barrera
qui met tout en œuvre pour préserver le potentiel des combattants mis à rude
épreuve dans la fournaise malienne.
Mais le cœur de l’ouvrage
réside dans la description des liens humains très forts qui unissent ces frères
d’armes plongés dans la guerre. Les instants de camaraderie, de partage, d’amitié,
de peur, de joie et de peine sont parfaitement rendus au travers les regards,
les sentiments ou les atmosphères décrits. La force morale d’une troupe est à l’image
du chef, du sergent eu général en passant par le lieutenant et le capitaine.
Ces derniers sont d’ailleurs les artisans de la victoire et de la résilience de
cette brigade confrontée aux attaques, aux tués (4 militaires français morts
pour la France), aux nombreux blessés et à l’horreur de la guerre asymétrique
(emploi des enfants soldats par les djihadistes). Enfin, le lien armée-Nation
transparaît au travers les nombreuses visites d’élus ou représentants de l’Etat,
par les références à la métropole (familles, villes de garnison) ainsi qu’avec
la confiance établie avec des journalistes qui accompagnent la Force dans ses
missions et qui peuvent témoigner du professionnalisme de l’armée française.
En bref, un livre à lire pour
saluer cette victoire sur l’obscurantisme et le terrorisme grâce à l’engagement
de ces femmes et de ces hommes au service de leur pays et de ses valeurs.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire