Les théâtres d’opérations contemporains soulignent la nécessité de mettre
en œuvre des missions d’assistance militaire opérationnelle (c’est-à-dire l’aide
technique et l’expertise auprès d’armées étrangères) rénovées et en adéquation
avec le besoin dans les conflits du moment. En outre, ces déploiements
interviennent, dans un contexte multinational voire international en Coalition
(Irak), auprès de partenaires régionaux (Afrique) ou à proximité d’autres
armées (Syrie et Russie).
Ainsi, les principaux acteurs observés engagent, aux côtés de leurs
équipes de « conseillers »,
des capacités nationales de feux indirects. Complémentaires de l’appui air-sol
et des hélicoptères, ces moyens issus de l’artillerie, déployés en permanence,
participent à la sécurité et à la liberté d’action de détachements (de conseil
ou de mentoring pour utiliser le
terme anglo-saxon) souvent légers et parfois isolés.
Aussi, il apparaît intéressant de réfléchir
à la systématisation de cet appui feux dans l’assistance militaire
opérationnelle (AMO) afin d’accroitre la protection comme l’efficience des
militaires engagés dans ce type de mission. Face aux menaces hybrides, il s’agirait
ainsi de donner à cette fonction opérationnelle un autre effet en plus de ceux
en lien avec l’appui traditionnel, le ciblage ou la « dissuasion
conventionnelle ».
Voir nos articles traitant de l'artiellerie sur ces sujets : http://lechoduchampdebataille.blogspot.fr/2012/02/lartillerie-un-outil-cle-dans-le-cadre_19.html et http://lechoduchampdebataille.blogspot.fr/2015/06/lartillerie-dans-les-guerres-de-contre.html
Les détachements de type AMO mis en place sur les théâtres d’opérations,
ont des structures, des objectifs et des effets qui vont au-delà des modes
d’action des détachements d’instruction opérationnelle traditionnels (temps de
paix, forces prépositionnées) mais qui diffèrent largement des dispositifs
déployés précédemment (par exemple, en Afghanistan). Que l’on évoque les DLAO[1]
au Sahel, les équipes d’assistance en
Irak ou encore l’engagement russe au profit des FASS[2],
l’assistance militaire opérationnelle s’est considérablement complexifiée.
Les conseillers, mentors et
autres instructeurs sont engagés auprès d’unités souvent déjà formées mais
surtout déployées en zone de combat et/ou d’insécurité. L’emprunte logistique
est réduite tout comme les effectifs ainsi que les modalités de stationnement
(généralement dans les emprises de forces locales). En effet, souvent
contraints politiquement ou sensibles à leurs opinions publiques, les pays
occidentaux souhaitent limiter leur engagement financier et humain, faire
effort sur certaines capacités à forte plus-value (renseignement, formation,
systèmes de commandement) tout en apportant leur expérience opérationnelle aux
troupes locales.
Cette aide, apportée au quotidien aux soldats des pays hôtes, varie de
l’instruction basique (secourisme au combat, tir,…) à la mise en œuvre de
savoir-faire propres aux états-majors (planification, coordination interarmes)
en passant par l’expertise spécialisée (maintenance, génie, déminage, lutte
contre la menace chimique,…).
Enfin, la sécurité repose à la fois sur les soldats des forces
partenaires et sur des dispositifs nationaux passifs (protection du camp,…)
comme actifs (unités de combat), voire même sur des moyens partagés entre
alliés (hélicoptères, drones,…).
Dans ce cadre, des armées alliées mais aussi d’autres acteurs
internationaux ont déployé des capacités de tirs indirects pour valoriser leurs
emprises, moyens dont ils font librement la promotion sur internet et sur les
sites institutionnels. C’est le cas, par exemple, des conseillers américains en
Irak qui disposent et utilisent, pour
leur sécurité immédiate, des canons M109A6 Paladin de 155mm. Ils peuvent ainsi
riposter aux tirs de harcèlement de Daech,
éclairer de nuit les abords des emprises et appuyer leurs éléments de
protection ou ceux des Irakiens face à des attaques complexes. Ces feux
peuvent, de surcroît, être employés, rapidement, en permanence, sans contrainte
liées aux conditions météorologiques difficiles (vents de sable, …) dans cette
région du monde.
Cet
exemple, pris sur un théâtre d’opérations atypique contemporain mais surtout adapté
àla nature nouvelle de l’AMO montre l’intérêt de disposer de moyens feux
autonomes et nationaux au plus près de ces détachements réduits et, par nature,
dotés d’une puissance de feux limitée.
Fort de ce constat,
alors que des réflexions sont menées pour rénover les concepts et la doctrine
d’AMO dans de nombreux pays occidentaux (engagés au Moyen-Orient et en Afrique),
il serait intéressant d’intégrer d’emblée et de systématiser le déploiement de
moyens feux indirects terrestres dans les détachements de ce type. Grâce à ces
capacités, les dispositifs, ainsi légèrement renforcés, gagneront en liberté
d’action dans des contextes sécuritaires difficiles face à un ennemi mobile et
asymétrique.
Cette observation est tout à fait pertinente. Cependant, il faut y apporter 2 nuances:
RépondreSupprimer1/ la formation des forces locales fait partie intégrante de la stratégie de sortie de crise; elle vise à former une force capable de prendre le relai et donc à nous permettre de nous retirer rapidement, donc de limiter la durée de notre opération; le problème, et on l'a vu en Irak et en Afghanistan, est que le suivi (donc l'après formation) n'est pas forcément à la hauteur, ce qui nécessite au final de conserver des soldats sur le terrain (donc échec au moins partiel de la stratégie de sortie, comme le montre l'allongement de la mission britannique en Afgha), ou que cette force est employée par le gouvernement local pour atteindre des objectifs qui ne collent pas forcément avec nos objectifs (échec du lead from behind à l'américaine).
2/ l'emploi de l'artillerie confirme un fait occulté depuis longtemps, en France tout du moins: seul le feu tue. Or l'artillerie est bien l'arme du feu massif, apporté depuis une zone sécurisée, c'est-à-dire loin de la ligne de contact; ce fait nous a été redémontré par les Russes en Ukraine. Or dans le cas des opérations actuelles, l'ennemi ne dispose ni de cette puissance de feu, et encore moins de moyens de la contrer; donc l'artillerie est un facteur de basculement de l'initiative. Le problème est que cette initiative gagnée n'est pas ou peu exploitée car la manoeuvre interarmes ne se décrète pas, il faut l'apprendre et cela prend du temps, bien plus que celui dédié aux missions d'assistance.
Bref nous sommes dans le cas d'un placebo qui vise d'un côté à rechercher un engagement court, peu couteux et à forte valeur-ajoutée médiatico-politique, et de l'autre à se prémunir contre des pertes au combat, politiquement insupportables (commennt justifier de la perte de soldats officiellement engagés dans une mission de formation et non pas de combat).
Merci pour votre commentaire, j'adhère effectivement à votre analyse quant au risque accepté. L'artillerie, cet Ultima Ratio est un symbole fort en opérations mais peut contribuer à la protecyion de nos soldats. A bientôt cordialement
RépondreSupprimerDepuis plusieurs, les Etats-Unis ont déployé également le lance roquettes multiples HIMARS pour des missions ''hit and run'' en Irak si l'on puis dire avec des roquettes de portée de 70 kù.
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