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lundi 17 octobre 2011

L'expérience australienne de contre-insurrection au Vietnam 1966-1971

Certains historiens ou militaires évoquent de plus en plus souvent l’expérience méconnue des troupes australiennes pendant la guerre du Vietnam et, en particulier, leur faculté d’adaptation à ce type d’engagement ainsi que leurs modes d’action spécifiques. Ces derniers sont ainsi décrits comme ayant été efficaces, du moins plus efficaces que la majeure partie des opérations menées par l’armée américaine. De la même façon, il est intéressant de constater que le format du corps expéditionnaire australien, ainsi que les missions et la zone d’engagement confiées, possèdent de fortes similitudes avec ceux, par exemple, de la TF La Fayette déployée actuellement en Afghanistan.
Il s’agira donc de déterminer, en quelques lignes, si cette expérience historique peut apporter des enseignements tactiques à l’aune des engagements français face à un adversaire de type insurgé.

La zone des opérations.

Engagé dès 1961 au Vietnam avec des conseillers militaires, l’armée australienne déploie, en juin 1966, deux puis trois bataillons d’infanterie et leurs appuis ainsi que des moyens aériens au sud-Vietnam. La zone confiée est alors la province de Phuoc Tuy d’une superficie de 390 000 km2. Elle est constituée d’une plaine centrale bordée à l’ouest par l’impénétrable zone spéciale Rung Sat, au nord et à l’est par des collines tenues par le Viêt-Cong et au sud par la mer. Ils doivent maintenir ouverte et sécurisée un axe logistique majeur, l’Highway 15. Les unités d’infanterie sont appuyées par une batterie, une compagnie de génie et un escadron blindé (Chieftain) australiens et par un bataillon d’artillerie américain. Quelques forces spéciales et une unité de reconnaissance complètent la Task Force.

Les engagements :

Dès son arrivée, le corps expéditionnaire cherche à prendre le contrôle de la plaine centrale et doit mener une bataille rangée, le 18 août 1966, à Long Tran face au 275ème régiment Viêt-Cong. A cette occasion, les soldats australiens font de lourdes pertes chez l’ennemi et démontre une réelle opiniâtreté au combat ainsi qu’un sens aigu de la manœuvre. L’adversaire doit abandonner les lieux et se replier dans les collines ou dans la jungle.
Une nouvelle phase commence alors pour les Australiens qui doivent alors mener une lutte antiguérilla. Pour cela, ils cherchent à mettre en pratique les savoir faire acquis en Malaisie entre 1948 et 1960, en particulier sous l’influence d’un officier australien expérimenté, le colonel Ted Serong. Ils conduisent donc des missions de transfert de villageois, des actions civilo-militaires et forment des troupes locales malgré la réticence de l’armée sud-vietnamienne. Pendant l’offensive du Têt, ils seront envoyés dans divers secteurs pour rétablir la situation mais ils ne sont jamais engagés dans des zones fortement urbanisées.
A compter de 1971, seuls des mentors resteront sur place pour former l’armée du régime de Saigon.




Le retour d’expérience :

Malgré de bons résultats, les Australiens constatent que la faiblesse de leurs effectifs (7672 hommes au plus haut) ne leur donne pas la possibilité de contrôler toute leur zone d’action. Ils commettent également des erreurs, à l’instar des bandes minées placées au sud de Dat Do pour éviter les infiltrations et dont les engins explosifs seront récupérés par le Viêt-Cong pour être réutilisés. Malgré tout, les insurgés se méfient des modes d’action australiens résumées clairement par un journaliste, Gérald Stone :« les patrouilles australiennes évitaient soigneusement pistes et clairières(…)traçant soigneusement leur chemin en silence dans des bosquets de bambous et les feuillages enchevêtrés,(…)ils étaient capables de donner la chasse à la guérilla sans s’exposer à des embuscades meurtrières qui ont coûté tant de morts aux Américains. ».
Ces modes opératoires en souplesse comme le « Cordon and Search »[1] suscitent des critiques véhémentes de l’état-major américain et du général Westmoreland[2] qui y voient un manque d’agressivité et de combattivité de leurs alliés. De la même façon les Australiens s’opposeront au programme de hameau stratégique[3] conduit par les Etats-Unis et le sud-Vietnam.
Pourtant, ce bilan australien reste en demi-teinte car les Viêt-Cong, conscients des potentialités de leur adversaire, esquiveront le contact et reprendront le contrôle de la province de Phuoc Tuy dès le départ du corps expéditionnaire en novembre 1971. Si 46 852 soldats australiens feront un séjour sur ce théâtre par rotations de 6 mois, près de 496 d’entre eux seront tués et 2398 autres blessés.

Certes, la méthode australienne apporte quelques solutions tactiques (souplesse d’emploi, utilisation du terrain, embuscades, ratissage,…), néanmoins, le contrôle du milieu est resté précaire et les actions envers la population n’ont pas permis de couper durablement la population de l’influence du Viêt-Cong. Dès lors, les enseignements restent limités pour les engagements actuels, comme ceux conduits en Afghanistan par exemple.
Frédéric Jordan
Souce image : site officiel du gouvernement australien pour la commémoration de l'engagement de ses troupes au Vietnam.

[1] Boucler et ratisser.
[2] Commandant les forces américaines au Vietnam.
[3] Villages ruraux fortifiés pour couper les paysans de l’insurrection communiste.

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