Aujourd'hui, 18 juin, date éminemment importante, comme symbolique, nous n'oublions pas la poignée des premiers partisans de la France libre qui ont initié le redressement politico-militaire français au cours du second conflit mondial.
Au-delà de cette date anniversaire, nous débutons une série d'articles afin de commenter le rapport, établi en 1946, par le général Marshall, alors chef d'état major des armées américaines à l'attention du secrétaire d'état à la guerre de son pays.
Cet officier, souvent évoqué au travers de son plan de reconstruction d'une Europe dévastée par la guerre, a d'abord été le remarquable concepteur puis planificateur de l'effort militaire des Etats-Unis et ce, malgré son implication méconnue dans les choix opératifs et stratégiques des Alliés sur le terrain. A ce titre, il porte un regard fort pertinent sur les grandes batailles des théâtres d'opérations, européen (face aux Allemands) et pacifique (face aux Japonais) mais aussi parvient à tirer, dans ce document que nous avons eu la chance de consulter, de riches enseignements sur l'action ou l'organisation des armées en campagne tant dans la gestion des territoires libérés que dans l'évolution des armes ou le coût humain des engagements violents entre 1941 et 1945.
L'occupation :
Marshall reconnaît que les Etats-Unis n'étaient pas prêts à organiser la gestion des territoires libérés voire occupés et qu'il a fallu le travail remarquable de la section des affaires civiles (créée le 1er mars 1943). Celle-ci a ainsi coordonné avec les autorités militaires les actions visant à assurer la sécurité des lignes de communication et de ravitaillement, à prévenir les sabotages mais surtout à se rendre maître des épidémies, à restaurer la production locale (pour limiter les besoins de l'importation) ou à maintenir l'ordre. Des officiers ont été formés à l'Ecole de gouvernement militaire installée à l'université de Virginie avant d'être déployés sur le terrain en liaison avec les représentants des gouvernements britanniques comme français (cas de l'Afrique du nord) mais également aux côtés de troupes combattantes dans les villes ou les régions nécessitant leur action (en Sicile, ces officiers débarquent avec les troupes d'assaut). On peut les voir comme les héritiers des "affaires indigènes" des empires coloniaux ou les ancêtres des ACM (actions civilo-militaires) mêlés aux services "interagences" mis en œuvre dans le cadre des stratégies d'approche globale contemporaines. Le travail de ces unités américaines et alliées nécessitèrent d'importants stocks d'approvisionnement en vivres, médicaments, charbon, vêtements, ... (2 millions de tonnes distribués en Italie), la construction de camps de réfugiés, des efforts sanitaires importants (pandémie de typhus à juguler) et des enquêtes pour protéger ou récupérer des œuvres d'art (volées, endommagées, menacées).
Les affaires civiles rencontrèrent des situations fort différentes selon les zones d'engagement. Si en France comme en Italie, les gouvernements provisoires locaux prirent rapidement la gestion des affaires courantes à leur compte (soutenant même l'effort de guerre en fournissant de l'acier et de la main d'œuvre aux forces américaines), ailleurs le gouvernement militaire dut intensifier son action face à des fonctionnaires locaux (Philippins par exemple) peu enclins à gérer l'urgence.
Un autre problème survint rapidement, celui de la gestion des prisonniers. En 1945, les Américains détenaient 3 050 000 prisonniers allemands et 130 000 italiens et furent contraints d'en désarmer, après la capitulation, 3 000 000 d'autres. Nombreux furent utilisés pour pallier l'absence de main d'œuvre dans l'industrie des Etats-Unis (62 075 800 journées de travail et 35 196 800 dollars payés par les entreprises américaines à leur gouvernement pour l'emploi de ces travailleurs particuliers). Il fallut ensuite organiser le retour de ces hommes dans leurs pays d'origine par voie de chemin de fer et par mer, situation rendue délicate par la découverte (en Allemagne) de près de 5 550 000 déportés, réfugiés civils ou anciens prisonniers de guerre. Pour gérer cet afflux humain, le général Marshall souligne la qualité de la nouvelle conception dans l'organisation de la police militaire (gestion du trafic, gestion des territoires occupés,...).
La gestion des affaires civiles a donc été un pilier essentiel planifié, consenti (avec des modes d'action soutenus financièrement, matériellement et humainement par Washington) de la stratégie militaire globale des Alliés et ce, pendant les combats ainsi qu'immédiatement après la cessation des hostilités, pour ce que nous nommerions aujourd'hui les phases de stabilisation voire de normalisation.
A suivre...
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