Nous poursuivons notre étude des grands principes logistiques illustrés par des exemples historiques.
2- Les 9 principes logistiques.
La logistique, comme la tactique qu'elle complète, possède ses propres principes et ce, afin de la rendre la plus efficace et la plus fluide possible dans la préparation, la planification, la conduite et l'accompagnement des modes d'action choisis par le chef militaire. Loin d'être également de simples recettes toute faites, elles demeurent les fils directeurs d'une bonne élaboration de la "manoeuvre logistique".
L'unicité de l'organisation.
Pour soutenir efficacement une force, en prenant en compte l'ensemble des particularités techniques et des missions confiées aux unités, la logistique se doit d'être organisée par une seule et même autorité capable de faire les choix dans la répartition des ressources, leur acheminement et leur gestion. Quand cela n'est pas réalisé, comme dans les Dardanelles (1915-1916), l'échec du soutien contribue à l'échec opérationnel.
En effet, sur ce théâtre il n' y a aucune coordination entre l'ANZAC et les Français entraînant une pénurie de munitions et une catastrophe sanitaire (145 000 malades en 1 an pour 14 divisions). En revanche, à l'occasion du réembarquement du corps expéditionnaire allié à partir de janvier 1916, l'unicité de l'organisation permet l'évacuation de 100 000 hommes, 200 canons et 5 000 animaux de nuit en 3 mois.
L'unicité d'action.
La logistique doit être pensée, planifiée et organisée en liaison avec la manoeuvre de la force, les objectifs recherchés et les moyens disponibles. La cohérence d'ensemble est alors une nécessité pour que la plan soit réaliste et réalisable quelque soient le milieu, l'adversaire ou les contraintes spécifiques au conflit.
Pendant la seconde guerre mondiale, en Afrique du Nord, Rommel refuse de prendre en compte les impératif liés au soutien de son Afrika Korps et devra rapidement adapter son action à la faiblesse logistique. En effet, il ne peut compter que sur le port de Tobrouk pour assurer l'approvisionnement de ses unités dans la profondeur et voit ses choix conditionnés (et restreints car il ne peut exploiter ses succès) par l'approvisionnement chaotique théoriquement assuré par les Italiens. Dans ses carnets il déclare alors avec aigreur : " La raison invoquée pour renoncer à une poursuite est presque toujours celle que donne l'officier chargé du ravitaillement, dont les moyens de transport ne suffisent plus à couvrir assez vite des lignes de communication allongées. Comme le chef militaire accorde ordinairement beaucoup d'attention aux avis de cet officier, permettant à ses estimations sur les possibilités de ravitaillemnt de déterminer son plan stratégique, les états-majors des services de l'arrière ont pris l'habitude de se plaindre à la moindre difficulté, au lieu de s'atteler plus energiquement à leur besogne et de recourir à leurs possibilités d'improvisation, lesquelles, il est vrai, sont nulles."
A l'inverse, du côté britannique, Montgomery cherche à culminer logistiquement avant de contre-attaquer vers El Alamein en rgroupant troupes, dépôts, matériels et munitions tout en bâtissant un réseau de communication remarquable dans le désert fait de routes et de ponts. Quand il attaque, il dispose d'une liberté d'action accrue par l'organisation de son soutien.
La cohérence de l'économie générale des forces.
Il s'agit de prévoir une planification qui hiérarchise les moyens logistiques nécessaires aux différentes phases de la manoeuvre tactique ou opérative, tout en prenant en compte le spectre élargi du soutien. Ce dernier regroupe les problématiques du carburant à celles du transport, en passant par l'appui médical, l'alimentation, les munitions mais aussi le travail en amont, qu'il soit du domaine industriel (équipements spécifiques, véhicules,...), de celui en lien avec la recherche scientifique ou la prise en compte du RETEX venu du théâtre (appelé aujourd'hui adapation opérationnelle).
L'exemple le plus abouti de ce principe est illustré par le plan COSSAC (1943-44) demandé par le général Eisenhower en prévision du débarquement en Normandie. Ce document, d'une grande richesse identifie 4 phases dont 2 à dominante logistique (gesyion des ports, débarquement) mais aussi prévoie l'approvisionnement exigeant d'une valeur de 22 000 tonnes par jour pour 19 divisions. Une pause opérationnelle est d'emblée prévue à la demande des logisticiens conscients des élongations et des besoins d'un combat blindé et mécanisé ambitieux face aux Allemands.
A suivre...
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