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lundi 18 novembre 2013

L'héritage tactique de la première guerre mondiale : le combat de l'infanterie.(2)


Nous poursuivons notre étude de l'ouvrage du commandant Bouchacourt, rédigé au sortir de la guerre et consacré à la tactique de l'infanterie et aux expériences opérationnelles des derniers mois du premier conflit mondial.
Dans l'attaque, après la phase de préparation et d'approche, il s'agit de faire irruption dans la position ennemie, moment clé de l'action pour prendre de court l'adversaire, le désorganiser et finalement disloquer son dispositif. L'action repose sur la surprise et sur de puissants moyens d'artillerie afin de développer un feu roulant continu, capable de masquer (et de protéger) les nombreuses troupes menant l'assaut. La surprise est obtenue par une mise en place des forces au dernier moment (nuit précédente), l'absence de terrassement (ou d'abris) ou de tirs d'artillerie de réglage.

L'auteur souligne néanmoins, qu'en 1918, cette manœuvre est facilitée par la lassitude allemande dont les forces ne bâtissent plus aussi bien leurs positions défensives. En effet, les réseaux de barbelés sont incomplets, les barrages de feux en avant des lignes (pour briser l'élan des attaques), tout comme les obstacles continus sont insuffisants. Dans l'exemple qui met en scène le 94ème RI, cette tactique est détaillée avec les variations liées à la situation réelle dans l'enlèvement, notamment, de la tranchée "Magdebourg". La vitesse de déplacement (100 mètres toutes les 3 minutes) et le serrage des unités (voir schéma) permet d'aborder l'ennemi, de s'imbriquer avec lui et ce, avant même qu'il ne puisse déclencher un tir de barrage.
 

Les menaces principales pour les troupes françaises demeurent pourtant les nids de mitrailleuses qu'il faut réduire, en engageant la réserve (une compagnie par bataillon), en concentrant les appuis ou en débordant les points de résistance allemands. De la même façon, les enseignements semblent démontrer que la traversée de la position ennemie doit se faire sur toute la profondeur du front dans le but de profiter des brèches dans les défenses discontinues puis de déborder les îlots de résistance et les attaquer à revers.
Le commandant Bouchacourt rappelle, tout au long de son propos, que l'artillerie, même si elle conquiert la supériorité des feux, ne peut neutraliser toutes les pièces des Allemands qui disposent donc, sur certains compartiments de terrain, d'un appui feux conséquent. En revanche, il dénigre, avec mauvaise foi, l'action des chars canadiens sensés accompagner les fantassins français. Il clame la grande initiative des cadres de l'armée française qui permet l'exploitation. Aussi, cite-t-il le règlement provisoire de manœuvre d'infanterie illustrant les choix judicieux constatés sur le terrain en 1918 dans la région de Mézières : "Au fur et à mesure de sa progression à l'intérieur de la position ennemie, l'infanterie doit compter de plus en plus sur elle-même. L'initiative des chefs d'infanterie prend alors une importance capitale pour la suite des évènements. Chef de corps, commandants de bataillons et même de compagnie ont à manifester l'esprit d'à-propos, de décision et d'audace qui permet seul de tirer tout le parti possible des circonstances favorables du combat, circonstances toujours fugitives et dont il faut profiter sans délai, sous peine de laisser à l'ennemi le temps de se ressaisir.
La partie consacrée à l'attaque s'achève par une synthèse des formations d'infanterie de base utilisées par les alliés (armements, déplacements), par un catalogue élogieux des appuis directs (mortier Stokes, canons de 37mm) et par une analyse des effets d'artillerie. Celle-ci est divisée en une partie consacrée à l'action d'ensemble (comme aujourd'hui) pour détruire les pièces adverses ou conduire la préparation d'artillerie (on dirait aujourd'hui le "battlefield shaping") et une artillerie d'accompagnement (adaptée selon les termes actuels) afin de réagir aux obstacles rencontrés et observés en conduite. Et l'auteur de conclure avec une note du général Joffre après la bataille de Verdun et son déluge d'acier. Cette citation concerne cette préparation par le feu qui peut se révéler parfois improductive :" L'évènement vient de prouver que des défenseurs battus avec cette puissance sont en mesure, au moment de l'assaut, d'occuper les débris des tranchées et d'y arrêter l'ennemi; ce que l'artillerie réalise en définitive, c'est la diminution des moyens matériels de la défense et son usure morale, non pas sa destruction."
Le chapitre suivant traite, quant à lui de la défense.
A suivre...

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