Alors
qu’actuellement, de nombreuses voix réclament un renouveau du lien armée-Nation,
arguant du fait que les Français se désintéressent des questions militaires et
que le service national a été suspendu, l’étude des écrits du passé nous révèle,
une fois de plus, qu’il a toujours fallu expliciter la guerre aux citoyens.
Ainsi, en relisant un ouvrage du général Percin rédigé en 1914, à la veille du
premier conflit mondial, intitulé « Le
combat » (voir la rubrique « A
lire »), on découvre un officier soucieux de rendre abordable au monde
civil les fondements et spécificités du métier des armes, les raisons de l’investissement
de l’Etat dans son armée, tout comme les procédés tactiques du moment.
Dès
son introduction, il admet s’adresser, non pas aux grands décideurs militaires,
mais « aux gradés, aux officiers d’active
et de réserve, aux mères, aux femmes et aux enfants de ceux qui risquent leur
vie pour la défense de la Patrie ». Son propos se veut donc d’une
grande pédagogie au travers de multiples références à l’histoire militaire, de
l’Antiquité au début du XXème siècle et ce, avec une appétence toute
particulière pour la guerre de 1870 qu’il a vécue ou encore, les conflits de son
époque (Balkans, Mandchourie, Boers,…).
Même
si on peut l’accuser de défendre la doctrine « de l’offensive à outrance » ou le primat des forces morales
cher à Ardant du Picq, théories qui mèneront à des pertes effroyables face aux
Allemands quelques mois plus tard, son analyse du combat demeure, en grande
partie, d’actualité. Elle permet à l’opinion publique d’appréhender l’essence
de la guerre, définie par Clausewitz comme la « dialectique des volontés » entre deux belligérants.
Tout
d’abord, le général Percin a déjà compris que l’investissement d’un pays dans
ses moyens militaires passe par un effort d’explication pour ceux qui, in fine, déterminent les choix de la
Nation. Dans ce cadre, il déclare d’emblée que « pour exercer, sur la préparation à la guerre, l’influence qui lui
revient légitimement, le public doit avoir quelque notion des différentes armes
sur le champ de bataille, être initié aux règles générales de leur emploi. Il
doit, sans explorer le domaine de la tactique, sans pénétrer le détail de nos
mécanismes de manœuvre et de tir, savoir comment les choses se passent au
combat ». Il est, en ce sens, un précurseur des défenseurs de ce que l’on
nomme aujourd’hui la culture de Défense symbolisée par des organismes comme l’IHEDN
créée dans les années 1930.
Le
général Percin bat ensuite en brèche les idées reçues sur la guerre qui, comme
aujourd’hui à l’heure des conflits asymétriques, suscitent le débat, la crainte
de l’enlisement ou provoquent des interprétations déformées sur la réalité du
terrain. Le soldat expérimenté, et auteur du livre, détaille, par conséquent,
le combat comme la lutte des forces morales, expliquant que la victoire n’est
pas toujours au bénéfice du parti ayant subi le moins de pertes. Il cite l’exemple
des Japonais qui, face aux Russes en 1904-1905, sont les vainqueurs malgré 41%
de soldats hors de combat contre 29% pour les armées du Tsar. Il rappelle que
le stratège allemand Von der Goltz affirmait déjà « qu’il ne s’agit pas tant d’anéantir les combattants ennemis que d’anéantir
leur courage », citation étant, de surcroît, une vraie leçon pour les
théâtres d’opérations contemporains.
Pour
l’officier français, vaincre c’est chasser l’ennemi du terrain en privilégiant
divers modes d’action :
-le
feu et le mouvement ;
-l’abordage
(l’assaut) pour provoquer la peur chez l’ennemi, considérant que le tir à
distance ne suffit pas car le camp adverse peut s’en protéger.
-la
surprise, déstabilisatrice et favorisée par la manœuvre de flanc des petites
unités ;
-la
poursuite (ou exploitation en utilisant un terme plus moderne). Il défend ainsi
l’idée que « celui qui laisse ainsi
à son adversaire le temps de se reformer après un échec, commet une faute ».
Selon
lui, le combat suscite la peur, sentiment inévitable pour le général qui l’explique
par la confrontation du soldat avec l’inconnu (le brouillard de la guerre, l’imprévu),
la surprise et l’isolement (élargissement du champ de bataille). Pour dépasser
cette peur, il propose d’expliquer la mission aux subordonnés (« le soldat doit connaître la manœuvre »
selon le général Bugeaud en 1834) et de développer l’esprit de corps. Ses
conseils ne s’arrêtent pas là car il souligne l’importance des leçons de l’histoire,
l’influence des forces matérielles (convaincre la société de bien équiper son
armée), le rôle clé des moyens d’entraînement, le temps nécessaire à l’instruction
du combattant (manœuvres, exercices réalistes) et enfin, l’implication et la préparation
opérationnelle des réservistes (pour compléter les forces d’active). Il s’agit bien
dans ce texte, vieux d’un siècle, d’un débat et d’arguments qui sont encore proches
des considérations contemporaines.
Enfin,
pour les néophytes, il donne des clés de compréhension sur les armes de son
temps, décrivant l’infanterie comme la reine des batailles capable de s’adapter
au terrain, la cavalerie centrée sur la sûreté et la recherche du
renseignement, l’artillerie au service des fantassins mais déjà portée à tirer
dans la profondeur pour conclure sur le génie symbole de « l’ouvrier combattant ».
En
bref, le général Percin, au-delà des idées tactiques qu’il cherche à défendre
en cette année 1914, apparaît comme un précurseur de cette nécessité de décrire,
au monde civil, la réalité du combat, ses enjeux, ses applications concrètes. Seules
de telles initiatives ont permis et permettront encore de sauvegarder le lien
entre la Nation et son armée, dans une compréhension mutuelle qui permettra de
garder à l’esprit que « la guerre n’est
que la continuation de la politique par d’autres moyens ».
Etes-vous seulement ignorant (ce qui en soit constitue une faute relativement grave) ou êtes-vous carrément socialiste ?
RépondreSupprimerComment pouvez-vous publier un tel article sans mentionner qui est Percin ?
Un général en mal de notoriété qui passe de la secte du Grand orient de France (en 1900) au parti communiste (en 1922).
- il contribue à la persécution des officiers de tradition catholique
- il abandonne à l'ennemi et envahisseur, armes et munitions à Lille en août 1910
- il écrit dans L'Humanité des "articles abominables", "semeur de haine entre Français, faussaire, calomniateur", etc.
Source : Buat Edmond, Journal 1914-1923, Perrin, 2015, pages 411 et 1236.
Bonjour
Supprimerje trouve votre message quelque peu agressif voire diffamatoire. Mon blog comme mon expertise font maintenant référence depuis 2011 dans le domaine de l histoire militaire. Je ne fais pas de politique et je laisse les polémiques à d autres intervenants ou auteurs. Je concentre mon travail d étude sur la tactique, la stratégie et l art de la guerre. Dans ce cadre les écrits du général Percin que je cite apportent une vraie réflexion sur l engagement militaire. Vos commentaires dans ce strict cadre sont donc les bienvenus. Merci de l intérêt que vous portez à mon blog.