Après
quelques jours de « pause
opérationnelle », comme promis, je vous propose une série d’articles
sur ces soldats venus d’Afrique, d’hier et d’aujourd’hui, qui ont écrit avec
leur sang une partie de de l’histoire militaire du XIXème ou du XXème
siècle. Aujourd’hui, je profite de
lectures pour vous faire découvrir les forces armées sénégalaises et ses
Jambaars.
Ce
mot, issu de la langue wolof et qui peut se traduire par « le guerrier, l’homme
valeureux », est aujourd’hui le terme officiel pour désigner les
militaires de l’armée sénégalaise.
Héritiers
des combattants des royaumes ancestraux comme celui du Walo ou du Baol, puis
des tirailleurs sénégalais qui ont combattu pour la France avec dévouement et
courage, ces soldats ont fondé, dès le 20 août 1960, une armée nationale
organisée, reconnue au niveau régional et international, respectueuse des
institutions et riche, aujourd’hui, d’une expérience opérationnelle éprouvée.
Dès
lors, nous verrons d’abord sa montée en puissance depuis l’indépendance, puis
son organisation actuelle et enfin, sa participation aux engagements militaires
de ces dernières années.
La montée en
puissance.
Après
l’indépendance puis avec l’éclatement de la Fédération du Mali en 1960, le
Sénégal se dote d’une armée nationale qui, selon le « plan raisonnable » mis en œuvre par la France prévoyait un
effectif de 5 000 hommes pour 1968 avec le déploiement d’un état-major, d’un
bataillon technique (une compagnie parachutiste, une compagnie de dépôt, une
compagnie de transport, une compagnie de transmissions et une compagnie de
génie), d’un bataillon à Saint-Louis (une compagnie de commandement et deux
compagnies de fusiliers voltigeurs), d’un bataillon à Kaolack (une compagnie de
commandement et une compagnie d’infanterie), et d’un bataillon à Tambacounda
(une compagnie de de commandement et une compagnie de reconnaissance). L’armée
de l’air et la Marine devront attendre 1972 pour gagner leur indépendance
fonctionnelle. Les Jambaars, sous l’égide du général Fall, leur premier
chef d’état-major, voient d’emblée leur mission dépasser le périmètre strict de
la défense au profit d’une participation accrue au développement du pays et de
ses infrastructures. A ce titre, cinq zones militaires sont créées en 1972 pour
mailler le territoire au plus près du terrain et de la population.
Conscient
de la nécessité de former ses soldats, l’Etat sénégalais investit très tôt dans
la formation avec l’école militaire de santé en 1968, l’école nationale des
sous-officiers en 1971, l’école des officiers d’active et celle de l’armée de l’air
en 1981, puis enfin la division d’application de l’infanterie de Thiès en 1984
(qui deviendra école d’application d’infanterie pour la sous-région dans le
cadre des ENVR en 1990). Parallèlement, l’état-major général des armées adapte
ses structures à l’augmentation des effectifs et à la modernisation des forces.
L’armée
sénégalaise aujourd’hui.
Le
président de la République demeure le chef des armées (15 000 hommes en
2012, tous professionnels) et le chef d’état-major général exerce son autorité,
au niveau opérationnel, sur les gouverneurs territoriaux des sept zones
militaires aujourd’hui instituées. Ces dernières représentent les fondements de
l’intégrité territoriale du pays et illustrent le principe de « déconcentration »
de la défense nationale sénégalaise. Sur les frontières, les unités de ces
zones sont chargées de constituer le premier rideau défensif face à un
agresseur avant l’engagement des unités dites de « réserve générale ».
Cette
force de deuxième échelon se compose pour sa part d’un bataillon parachutiste
(3 compagnies de combat), d’un bataillon de commandos (3 compagnies de combat),
d’un bataillon de blindés (3 escadrons de chars ERC 90 Sagaie), d’un bataillon
d’artillerie (une batterie de TRF1 155mm, une batterie d’obusiers 105HM2,
une batterie anti aérienne- canons), d’un bataillon du train (à deux escadrons
de transport).
Sur
l’ensemble du territoire, on trouve ensuite les 6 bataillons d’infanterie (à 3
compagnies de combat appuyées par des canons de 20mm et des mortiers de 120mm),
et les quatre bataillons de reconnaissance et d’appui (deux compagnies sur
Sagaie et une compagnie d’infanterie motorisée). Pour les raisons évoquées plus
haut, le génie militaire tient une place particulière au Sénégal et contribue
aux nombreux chantiers d’aménagement du territoire. Dans ce cadre, le bataillon
de soutien du génie, ainsi que le bataillon des travaux du génie déploient
leurs équipements pour l’appui aux troupes et la dépollution (déminage en
Casamance par exemple) mais aussi pour des projets civils comme la construction
de routes, le montage de pont ou le forage de puits.
L’armée
de l’air dispose de deux groupements opérationnels (hélicoptères Mi 35 et Mi 7,
avions de transport et d’appui au sol de type Casa ou Epsilon), d’un groupement
de soutien et d’un groupement de fusiliers de l’air. La Marine peut compter sur
des patrouilleurs maritimes et des bâtiments fluviaux ou amphibies.
Il
est à noter que le 1er bataillon d’infanterie est actuellement le
régiment de tradition sénégalais et a repris, à ce titre, les attributs du 1er
régiment des tirailleurs sénégalais. Quant aux autres unités, elles arborent,
toutes, la fourragère française aux couleurs de la Croix de guerre 1914-1918 en
souvenir des sacrifices consentis par la « Force noire ».
Une riche
expérience opérationnelle.
Forts
de leurs engagements en Casamance (sur lesquels nous reviendrons dans un
prochain post) et de leur professionnalisme reconnu, les Jambaars ont très tôt
été engagés à l’extérieur de leurs frontières pour des missions de maintien ou
de rétablissement de la paix sous l’égide de l’ONU ou d’organisations
africaines (CEDEAO) mais également dans des opérations en lien avec des accords
de défense auprès d’autres pays africains. Dans 20 théâtres différents, du Katanga
en 1960 à la Guinée Bissau en 1998 en passant par la Gambie, le Sinaï, le Tchad
ou l’Arabie Saoudite (opération Desert Storm), le soldat sénégalais défend à
chaque fois une tradition de solidarité internationale et des principes de
protection de la paix, de défense de la démocratie et de soutien humanitaire. Aujourd’hui,
ayant acquis la confiance des instances internationales, l’armée sénégalaise
déploie encore des contingents au Soudan, en Côte d’Ivoire, en RDC, en Angola
et en RCA-Tchad.
Pour
conclure, il apparaît que les forces armées sénégalaises représentent, sur le
continent africain comme sur la scène internationale, un exemple d’armée
professionnelle, efficace, respectueuse de l’état de droit et riche de son
expérience opérationnelle et ce, malgré sa création récente (52 ans). Fiers de
leur histoire militaire, les Jambaars ont su mettre sur pieds un outil de
défense évolutif et adapté au théâtre national comme aux engagements extérieurs
qu’ils soient dans un cadre de stabilisation ou de coercition. Guidés par leur
devise : « on nous tue mais on
ne nous déshonore pas », ils écrivent, parfois en lettres de sang, les
pages de leur histoire militaire à l’instar des mots du président et célèbre
Léopold S. Senghor : « Héritiers
d’une noble tradition dans laquelle l’homme n’avait besoin que d’un cheval, d’un
fusil et d’une noix de cola pour s’en aller mourir au loin, pour l’honneur,
dans une belle chevauchée ».
Merci beaucoup Frédéric pour ce beau résumé.Je reviendrai plus tard comme promis avec quelques contributions. Colonel Cissé
RépondreSupprimerMerci pour cet article
RépondreSupprimerJuste pour préciser la devise :
On nous tue, on ne nous deshonore pas
il n'y a pas de "mais"