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« L’écho du champ de bataille » a pour ambition de vous proposer à la lecture et à la réflexion des contributions sur des sujets relatifs à la stratégie, à l’art opératif, à la tactique et plus largement sur l’engagement et l’emploi des armées. Ces brèves, illustrations ou encore problématiques vous seront livrées sous le prisme de l’histoire militaire mais aussi sous celui des théâtres d’opérations d’hier, d’aujourd’hui, voire de demain. Des enseignements de grands chefs militaires de toutes les époques aux analyses polémologiques prospectives en passant par la doctrine ou aux équipements des forces françaises et étrangères. Gageons que vous aurez plaisir à lire ces articles ou à contribuer au débat. Bonne lecture…

lundi 3 août 2015

La première guerre mondiale au jour le jour : juillet -août 1915.


 
Le lieutenant-colonel Rousset poursuit son analyse à chaud des combats du premier conflit mondial, notamment la nouvelle étape que représente l’été 1915. Dans ce cadre, il met en exergue les combats des Vosges, en particulier ceux de La Fontenelle où les Français s’emparent d’une puissante position allemande adossée à un observatoire naturel. Néanmoins, de son récit, on comprend que ce succès est surtout dû à l’échelle réduite de l’objectif, à la concentration d’artillerie consentie sur ce point particulier et à un assaut brutal de l’infanterie qui fera plus de 800 prisonniers allemands. Cette victoire localisée n’a que peu d’effet opératif mais démontre que la puissance du feu indirect conjuguée à un assaut dans la foulée peut avoir des résultats tactiques probants. Pétain fera d’ailleurs de même en 1917 à la Malmaison après le désastre du Chemin des Dames. En attendant, l’état-major se contente de ces avancées limitées.

A compter du 10 juillet, notre témoin croit voir dans la retraite russe une manœuvre réfléchie pour attirer l’ennemi vers une ligne défensive mieux garnie et pour concentrer des forces renouvelées. En fait, les troupes du Tsar manquent de ravitaillement, de moyens d’appui et tentent, tant bien que mal de freiner la poussée austro-allemande. Le 13 juillet, les Allemands attaquent violemment en Argonne avec un corps d’armée lancé sur un front de 3 km et l’utilisation de gaz asphyxiants, mais ils sont stoppés par une contrattaque française. Les 14,16 et 19 juillet, les aéronefs français mènent de plus en plus de bombardements dans la profondeur du front adverse sur des nœuds ferroviaires (Libercourt, Chauny, Vouziers) marquant par là un emploi plus raisonné de cette nouvelle arme. Du 16 au 18 juillet, les Allemands et les Autrichiens, profitant des denses chemins de fer de Prusse orientale, regroupent leurs moyens et poussent leur avantage sur le front oriental, écrasant les Russes à Krasnystaw et sur la Narew. Pour l’auteur, ces forces des empires centraux prennent un gros risque en étirant leurs unités sur l’immensité de la steppe (offensives appelées « en cordon ») comme en s’éloignant des lignes de communication.
Dans le même temps, les Hauts de Meuse (village des Eparges) et l’Argonne sont le théâtre d’âpres combats. Le 21 juillet, les Italiens remportent une nouvelle victoire contre les Autrichiens sur le plateau du Carso à l’est de l’Izonzo et font 2000 prisonniers. Le lieutenant-colonel Rousset y voit les prémices d’une offensive d’envergure plus large de ces nouveaux alliés. Le 24 juillet, de nouveaux succès français sont annoncés dans les Vosges mais aussi l’avance britannique en Mésopotamie, le long de l’Euphrate (bataille de Naseryé où les Turcs perdent 3000 hommes) et la prise de N’Djassi au Cameroun par une colonne franco-anglaise. Néanmoins, le 26 juillet, une force allemande de 2000 hommes attaquent les Britanniques en Rhodésie Le 2 août, notre témoin commémore avec émotion le premier anniversaire du conflit considérant qu’il est une étape essentielle pour le salut de la France, la Revanche de 1870 et les ambitions de Berlin. Il considère que les trois conditions de la victoire sont la valeur de l’armée, la patience des civils et une activité industrielle illimitée. En revanche, le 5 août, il ne fait plus aucun doute que les armées russes sont en déroute enveloppées selon trois axes par les troupes autrichiennes, celles de Mackensen et celles d’Hindenburg. Le Tsar demande à ses armées de basculer sur la rive droite de la Vistule et prépare l’abandon de Varsovie conquise par les Allemands le 7 août. Pour le lieutenant-colonel Rousset, ces mauvaises nouvelles ne doivent pas faire penser que l’irréparable est en place, ses références permanentes à Napoléon lui soufflant que le peuple russe peut être résilient et pourrait reprendre l’initiative. Il critique les manœuvres allemandes dont les tactiques semblent être très uniformisées à l’image des tentatives d’encerclement successives sur le front oriental.
 

 
A compter du 10 août, c’est la guerre maritime et aérienne qui prend le dessus des opérations avec de nombreux torpillages dans les Dardanelles, en Adriatique ou dans la Mer du Nord (cuirassé turc Barbarossa, sous-marin U12 autrichien, contre-torpilleur britannique Lyna) et des bombardements violents, y compris sur les côtes anglaises (zeppelins allemands).
Le 13 août, à Gallipoli, 20 000 soldats de sa Majesté débarquent par surprise sur la côte occidentale du Golfe de Saros ; ils prennent pied, près du cap Suvla, dans la baie de Hannafart. Un poste de 50 Turcs, enlevé par un coup de main la nuit précédente n’a pas eu le temps de donner l’alarme. L’avance de ces troupes sera d’abord très rapide et le 16 au soir elles camperont à 14 km de la côte. Mais ensuite, le manque d’eau potable et l’intervention des réserves ennemies venues de Boulair et de Kilid-Bahr, retarderont leurs mouvements et empêcheront de recueillir tous les fruits de la manœuvre ainsi entamée en arrière d’Achi-Baba. C’est le drame de cette expédition des Dardanelles (voir notre article http://lechoduchampdebataille.blogspot.fr/p/les-dardanelles-1915-1916_12.html qui est conçu avec intelligence comme une tactique d’approche indirecte audacieuse sans les moyens logistiques ni la hardiesse des chefs militaires nécessaires à une telle manœuvre amphibie. L’été 1915 semble ainsi montrer que les espoirs placés dans l’allié russe seront insuffisants et que les actions d’envergure, telles qu’elles sont planifiées à l’ouest ou en Méditerranée, peinent à obtenir des résultats décisifs.

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